Alors que le mot complotiste est subitement remis à la mode, et essentiellement par la gauche pour ridiculiser, faire taire et dénoncer les opposants de tous bords et ceux qui ne se soumettent pas, je pense important de faire un petit rappel sur ce qu’est vraiment un complot.
Des complots, des vrais, il en existe et en a toujours existé. L’homme et son Histoire sont jonchés de complots. Le cambriolage d’une banque, l’assassinat d’un homme politique, l’espionnage d’un opposant, la préparation d’un attentat terroriste, une opération d’activistes politiques ne peuvent être réalisés qu’avec une préparation, une préméditation – c’est à dire un complot.
Le complot implique le secret
Un complot a une caractéristique principale indispensable : le secret. Un complot ne se prépare pas au grand jour, ou alors ce n’est pas un complot. Exposer un projet qui n’a pas été préparé dans le secret n’est pas être complotiste : je pense ici à mon amie Bat Ye’Or qui a révélé le projet Eurabia, et a été qualifiée de complotiste pour cela. Complotiste voulant dire ici qu’elle aurait inventé des complots qui n’existent pas. Il se trouve que Dreuz est en possession des 5 premiers numéros de la revue Eurabia, qui contient les projets que Bat Ye’Or a décrits et expliqués dans son livre à succès, Eurabia.
Eurabia n’est donc pas un complot – rien n’était secret – pas plus que Bat Ye’or n’est une complotiste.
Chasse au con, chasse au complot
Rechercher si un complot se cache derrière un événement devrait être la démarche naturelle de tout journaliste – quand il existait encore des vrais journalistes – mais aussi de toute personne qui doute. Douter du pouvoir, douter du gouvernement, douter des bonnes intentions de ceux qui ont le pouvoir de décision et peuvent tirer un avantage d’une situation, ou en pâtir.
Complot contre complotiste
C’est là que se présente la vraie difficulté : comment faire la différence entre un vrai et un faux complot, comment distinguer le bon grain de l’ivraie, le bon vieux complot des familles comme l’histoire du Monde en regorge, du complotisme ?
Jusqu’à avant-hier, les adeptes des théories du complot voyaient des complots partout : Chemtrail, 9/11, 5G, Elvis Presley, aujourd’hui le coronavirus, et bien entendu, la mère des complots : le complot juif. Le fait qu’aucune preuve de ce qu’ils avancent n’existe est pour eux la preuve même qu’il s’agit bien d’un complot : toute discussion est par conséquent strictement impossible, leur croyance est religieuse. Contredisez-les, c’est que vous faites partie du complot, ou votre lavage de cerveau est si intense que vous êtes endoctriné, et devez cesser de croire ce que vous entendez – sauf des complotistes, cela va sans dire.
Comment faire la différence
C’est là qu’il importe de faire la très importante différence qui permet de distinguer un complot d’une « théorie du complot ».
Le vrai complot, c’est lorsqu’il existe un début de suspicion autour d’un événement. C’est lorsque des failles sans explication logique, des incohérences et des anomalies apparaissent dans le discours officiel. C’est lorsqu’on vous demande d’accepter sans broncher des explications à dormir debout et des théories tirées par les cheveux. C’est lorsque la grande presse omet de couvrir les contre témoignages, ou pire, lorsqu’elle dépense son énergie à les détruire. Là, le journaliste à l’ancienne doit enquêter. Là, l’honnête homme doit poser des questions. Là, les réseaux sociaux apportent une précieuse contribution : celle des témoins directs, et pas seulement de ceux, filtrés, triés avec soin dans le sens du narratif recherché, choisis pour ce qu’ils ont à dire par les agences de presse. D’autant que les témoins directs, aujourd’hui, ont des vidéos, que les médias occultent lorsqu’elles contredisent leur angle exclusif. Là, les médias sont les complotistes d’une théorie unique, et appellent complotistes ceux qui nient leur complotisme.
Les journalistes complotent, donc ils pensent que vous aussi
A cet instant, si le sujet peut mettre leur camp à mal, les propagandistes de la grande presse s’activent. Ils ne veulent surtout pas savoir ce qui se passe vraiment, ils ne veulent pas que le public sache ce qui se passe vraiment, et ils n’ont pas le droit de chercher à savoir ce qui se passe vraiment (je me souviens d’un journaliste ami dont l’article contre le Qatar a été censuré par le Figaro parce que l’article était factuel). Ils protègent le pouvoir au lieu de douter de lui, soit parce que le pouvoir est dans leur camp idéologique, soit parce qu’ils tiennent à leur chèque de fin de mois, soit parce qu’ils sont tellement paresseux qu’ils n’ont pas envie d’en savoir plus : autant de mauvaises raisons pour lesquelles les gens curieux qui posent des questions et fouillent, exposent la corruption des médias lorsqu’ils trouvent.
Réponse des journaux : quand on ne peut pas se débarrasser du message, on attaque le messager, et les insoumis sont accusés de complotisme.
Comme si les choses n’étaient pas assez compliquées comme ça !
Mon premier est un complot, mon second est un complot, mon troisième est un complot, et ceci n’est pas un complot
Nous avons donc maintenant trois sortes de complots : les vrais, les délires conspirationnistes, et les accusations de complot par les médias, destinés à protéger le pouvoir, en accusant de complotiste tous les opposants à la thèse officielle et aux idéologies de gauche, en deux mots : la droite (extrême droite, fachosphère, suprématiste blanc, les termes varient).
Vous n’êtes pas d’accord avec notre vision ? Complotiste ! Le mot est aussi loin de son sens qu’accuser un maraîcher de crime contre l’humanité des tomates qu’il cueille.
- Des médecins expriment des doutes sur les décisions officielles autour de Covid-19 : complotistes.
- Des commentateurs conservateurs rapportent les faits sur la politique suivie par Trump : complotistes.
- Le socialisme est destructeur : complotiste (et demain, incitation à la haine).
- Des terroristes se glissent parmi les réfugiés : complotisme.
- Les Palestiniens veulent la destruction d’Israël : délire complotiste.
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- L’Iran veut construire une arme nucléaire et non un nucléaire civil : complotisme.
- L’islam veut dominer le monde : complotisme.
Je m’arrête, vous avez pris la photo.
Pierre-André Taguieff est l’auteur qui a le mieux expliqué la mentalité complotiste, ce besoin d’ordre dans un monde en chaos qui les inquiète et leur échappe et qu’ils tentent d’expliquer pour se rassurer, pour reprendre un peu de pouvoir sur lui. Cela n’a rien à voir avec la contestation des thèses officielles ni à la divulgation des complots de journalistes progressistes pour faire admettre leurs théories contre-nature. Mais chut, ne soyons pas complotistes, ne relevons pas que les médias disent tous les mêmes choses sur les mêmes sujets au même moment, on nous accuserait d’être complotistes.
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