L'ombre d'une peau
Le coup de gueule qui suit ci-après m'a été inspiré par un américain, à la peau noire, qui a trouvé hier la mort lors de son arrestation musclée dans la ville de Minneapolis au États-Unis. Le policier, à l'épiderme blanc, l'a plaqué au sol sur le ventre et l'a immobilisé avec un genou sur le cou durant de longue minutes. La victime avait beau se plaindre d'étouffer, mais ignorant ses plaintes, l'agent lui intima de rester calme... Nonobstant les alertes répétées d'un passant : « Il ne respire plus, il ne bouge plus, prenez son pouls », le flic fit la sourde oreille. Le pauvre bougre décéda peu après son transport à l'hôpital. Suite à la manifestation qui a suivi, le maire de Minneapolis a eu cette phrase : « Être Noir ne devrait pas être une peine de mort. »1)
L'ombre d'une peau surgissant de contrées irréelles, une figure exotique émergeant des abîmes de l'effroi, pétrifie l'esprit bien-pensant, immobilise l’œil pétri d'habitudes ; l'inconduite gît sous l'épiderme, le vice se cache sous la peau.
L'affreuse langue s’allume, un feu glacial dévore l'intrus ; la lèvre piquante s'enfonce, une marée purulente empeste l'âme ; la salive cramoisie se déverse, le verbe en sang noie l'étranger.
Je t'aperçois, toi, mon frère, dans la froideur luciférienne ; je t'examine, toi, mon prochain, dans la tour démoniaque. Le sourire de mon âme se glace dans ta bouche ; la joie de ma peau s'assombrit de ta couleur.
Mes cheveux crépus frisent la sinistre figure ; mes yeux bleus sur fond noir ombrent l'azur de ton jardin ; l'épatement de mon nez emplit le creux d'une raison.
Pourtant, dans la vallée des larmes, nous perdons nos visages ; pourtant, sur la cime de l'amour, la félicité nous confond ; pourtant, dans la gueule du temps, les poussières nous rassemblent.
Mais du tréfonds de nos entrailles, s'élèvent des races de cœurs.
1) https://www.tdg.ch/un-noir-meurt-lors-de-son-interpellation-786309369828
David frenkel