Rideau !
Les tissures séparent bien des mondes.
La vergogne se drape d’une étoffe.
Entrez donc chairs flasques, corps difformes,
Le regard stoppe à la frontière d’un tissu ;
L’œil ne se pose pas sur votre bande intime ;
La nudité est plus belle ou moins cruelle
Quand le vêtement étoffe l’imagination.
Rideau, derrière toi on ourdit une intrigue ;
Mais devant toi on applaudit un drame.
Sous un manteau d’arlequin,
La fiction est le fil conducteur.
Confiné dans les hauteurs,
Il laisse le champ libre à un auteur.
La comédie et la tragédie
S’abandonnent aux trames d’une pièce,
S’enfilent à travers les chaînes
Formant la texture d’un monde sur mesure ;
Le théâtre tisse les habits des hommes ;
La magie des mots élève un rideau.
La courtine sépare deux classes
Dans les carcasses vrombissant
vers maintes destinations aériennes ;
Mais piégées par les turbulences,
Prises dans la nasse de la catastrophe,
La camarde fusionne les deux classes.
Le voile embrume les cieux féminins ;
Il tamise la beauté d’une vénus
Lorsque le voilage ondule sous le dogme,
Il se détache et enveloppe la chair
D’un ordinaire sans forme ;
Sous la burqa, seuls des yeux jaillit la flamme
Des âmes efféminées
Pointant derrière les rideaux bonne femme
Retenus par les liens hiératiques.
Parfois la vilenie abaisse.
Construit sur un sol où pousse la vanité,
Élaboré par la suffisance,
Un tissu de mensonges sépare certains;
Enfoncés dans l’erreur ils se durcissent.
Les cœurs de pierre jouent sur du velours
Lorsque les peurs emprisonnent la raison,
Quand les idéaux asservissent le bon sens.
Crions alors tous: "Rideau".
David Frenkel
Publié sur le site De Plume en Plume qui en a fait l'illustration