Je t’aime, belle amitié !
La tendresse d’un regard
Pointant sur mes yeux hagards ;
Le sourire d’un minois
croisé tous les jours du mois ;
Le frôlement d’une main
M’émouvant certains matins ;
Une gentille parole
Parmi des propos frivoles ;
Sont mes réguliers bonheurs
– L’amitié me rend honneur.
Elle écoule la bonté
Sur le mendiant éhonté
Et remplit mon escarcelle
Quand les besoins me harcèlent ;
Parfois, quand je suis à court,
– Amitié, vers toi je cours.
Les jours où la coupe est pleine,
Je verse toutes mes peines
Dans une oreille attentive,
Bellement compréhensive ;
Elle connaît mes secrets
Et adoucit mes regrets ;
Mes tracas, elle la gomme,
– Douce amitié, je la nomme.
Le Seigneur l’a fait régner
Sur mon esprit résigné
Pour tenter de consoler
L’amant d’un baiser volé ;
Accablé par la douleur,
– L’amitié sèche mes pleurs.
Son nom brille jusqu’ici
Quand mon soleil s’obscurcit ;
Elle illumine la route
De mon âme en déroute
En éblouissant mes fautes,
Mes qualités aux yeux sautent,
Mon être devient moins terne
– L’amitié, c’est ma lanterne.
Elle déploie ses beaux charmes
Lorsque l’amour fond en larmes ;
L’ensorceleuse sourit
A l’adoration meurtrie
Espérant gagner les cœurs
Et effacer les rancœurs ;
Quand le couple perd sa muse,
– L’amitié montre sa ruse.
L’habitude peut noircir
Un amour jusqu’à l’occire,
Mais l’amitié n’a que faire
Du quotidien ordinaire ;
Elle peut prendre racine
Dans les têtes qui dessinent
Une belle sympathie
Sur des mines décaties ;
L’amitié tombée du ciel,
– C’est l’amour providentiel.
Je t’aime, belle amitié ;
Deviens ma chère moitié ;
Ce sera pour le meilleur
Le pire, lui, est ailleurs.
David Frenkel