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  • Les joies du portable... Insupportable

    Oui, halo ! Je suis dans le bus
    Dit-elle avec un accent russe ;
    Sa voix un peu enrouée mais enjouée
    Détendait grandement les personnes nouées.
    Une mélodie extraite de « Carmen »
    Fit tressaillir et bondir un énergumène
    Qui se jeta sur son portable dernier cri
    En dévisageant les autres avec mépris.
    Un air célèbre d’une chanson à la mode
    S’éleva du dessous d’une manche pagode,
    Un petit mobile s’en extrayait
    Le quidam qui parla avait l’air niais.
    Une sonnerie vibrante
    Secoua l’humeur somnolente
    Des personnes mal réveillées
    Qui n’arrêtaient point de bailler.

    Des extraits de conversations,
    Des bribes de lamentations
    Tombaient dans le creux de mes oreilles
    Et meublaient mon trajet à merveille ;
    Des déboires amoureux,
    Des événements heureux
    Rendent compte d’une actualité
    Prenant racine dans l’intimité
    De ces inconnus qui deviennent volubiles
    Quand ils ont sur eux un téléphone mobile.

    Un voyageur retenant son interlocuteur
    Mit fin à son discours par un « À tout à l’heure » ;
    Un vieux, épanchant longuement ses avatars
    Cria dans son portable : « Eh bien, à plus tard ! » ;
    Un soupirant pleurant son amante en fuite
    Lâcha pour terminer : « Alors, à tout de suite ».
    Je trouvais tout cela comique
    Ils rendaient mon voyage épique.

    Le mobile est un puissant aimant
    Attirant les gens à tout moment
    Dans les méandres du bavardage
    Dans lesquels les besoins se partagent
    Il peut aussi transformer en billevesée
    Une attitude diablement empesée.
    Le portable est une douce drogue
    Et du pain béni pour les psychologues.

    David Frenkel